La Pâques est finie. Pendant cinq jours, les chants réligieux ont remplit les supermarchés alors que la clientèle – que ce soit en robe de prêtre, en habit de bonne soeur ou en hijab – chargeaient tous leurs caddies en anticipation d’un week-end marathon. Les feux d’artifice venant de l’église retentissant de l’aube au petit matin, ponctuaient à intervalles irréguliers les festivités pascales. Je me demandais si on les allumait moyennant des dons, comme pour les cierges, mais en plus ostentatoire. Nous avons reçu de la part du comptable un SMS proclamant “Qam el Massih haqan” (En réalité le Christ est levé) et les allées et venues des foules pour la messe portaient avec elles une nuée d’encens.
Mais les stands à Pepsi qui avait proliféré aux bords des cimetières ont disparu, et la plupart des linceuls blancs qui pendaient des grandes croix attachées aux réverbères (remplaçant ceux du vendredi saint en noir) sont partis ou du moins ne sont plus très blancs. Certes, des poulets dansent encore dans les vitrines, baguette magique sous l’aile, mais on aura le temps de s’y habituer; certains sapins de Noël s’éternisaient aux coins des rues une semaine avant la Pâques comme si les gens du quartier ne supportaient pas de se passer de quelque décoration criarde ne serait-ce que pour quelques jours. Le nombre de poussins teints en fluo est revenu à la normale. La musique chorale qui envahissait le quartier ne sait plus couvrir l’appel à la prière et les cloches et minarets de nouveau résonnent à qui mieux mieux.
Il m’est toujours aussi frappant de voir comment, lors de chaque fête, la montée de piété n’est surpassée que par la montée simultanée du consumérisme. En occident, la préoccupation commerciale a quasiment supplanté la nature réligieuse des fêtes. Au Liban, comme en occident, la réligion relève de la tradition autant que de la foi, mais ici la tradition règne en maître. C’est une affaire de tribu.
D’autres cultures sont tout aussi pieuses mais moins consuméristes. “Three seconds to decide, three years to pay”, proclame une affiche à Beyrouth. Ça sonne plus malavisé que séduisant.
Entretemps, en France, La Banque Postale, pour se différencier des méchants et ambitieux traders et des gérants d’actifs imprudents, a lancé sa nouvelle offre de crédit à la consommation avec le slogan moralisateur “Un crédit pour les moments importants, pas pour les envies du moment”.
Je ne sais pas lequel est pire.